Le barème Macron

Indemnisation des licenciements : l'application du barème Macron

Le régime organisant l'indemnisation des licenciements sans cause réelle et sérieuse a été modifié par l'ordonnance du 22 septembre 2017. Elle a été mise en place par le gouvernement Macron dans le but de sécuriser les relations de travail entre employeurs et employés, sachant qu'elles sont actuellement source de réels contentieux. L'objectif de cette ordonnance est d'harmoniser les décisions des juridictions prud'homales, pour assurer l'égalité des justiciables aux yeux de la loi dans tout l'Hexagone.

Quels salariés sont concernés par le barème Macron ?

Les mesures du barème d'indemnisation Macron seront d'application pour les licenciements notifiés à partir du 25 septembre 2017. Deux critères essentiels régissent l'indemnisation en l'occurrence. Il s'agit de :
  • l'ancienneté du salarié.
  • l'effectif de l'entreprise selon qu'elle emploie jusqu'à 11 ou plus de 11 salariés.

Quels salariés ne sont pas concernés par le barème Macron ?

Il existe en effet des hypothèses spécifiques dans lesquelles le barème ne peut être appliqué. L'objectif ici est de protéger les intérêts des salariés les plus vulnérables, ou qui sont injustement affectés par le licenciement. Dans ces hypothèses, l'indemnisation doit être supérieure ou égale au salaire des six derniers mois. Ces restrictions s'appliqueront lorsque le juge estimera le licenciement nul pour :
  • Violation d'une liberté fondamentale.
  • Faits de harcèlement moral ou sexuel.
  • Discrimination.
  • Licenciement d'un salarié protégé en raison de l'exercice de son mandat.
  • Mesure discriminatoire à la suite d'une action en justice relative à l'égalité professionnelle entre hommes et femmes.
  • Violation des règles relatives aux salariées enceintes, aux salariés en congés pour naissance ou adoption, aux salariés victimes d'accident de travail ou de maladie professionnelle.

Comment ça marche ?

L'article L.1235-3 du Code du travail prévoit deux tableaux fixant les minima et les maxima relatifs au montant des indemnités pour les dommages et intérêts pouvant être fixés par le juge de prud'homme dans les cas de licenciement injustifié, sans cause réelle ni sérieuse. Selon ces extrêmes, le montant de l'indemnité oscillera entre un mois et vingt mois de salaire.

Plus concrètement, un salarié dont l'ancienneté est par exemple d'une année complète pourra espérer en cas de licenciement une indemnité se situant entre un et deux mois de salaire brut. En revanche, un salarié d'une ancienneté égale à quatorze ans complets aura droit à une indemnisation comprise entre trois et douze mois de salaire brut.

L’intérêt du barème Macron pour l’employeur

Le barème Macron offre un avantage non négligeable aux entreprises : l’anticipation. Il leur permet de fait d'anticiper avec précision le coût d'une éventuelle rupture du contrat de travail. Une telle possibilité est assurément bénéfique pour la comptabilité de l'entreprise. L’objectif ? À travers ce mécanisme, les entreprises seront plus enclines à embaucher sans craindre le paiement d'indemnités importantes en cas de licenciement. 

Le risque pour le salarié

Il faut cependant remarquer qu'à l'entendement des salariés, les modalités du barème Macron amenuisent quelque peu les indemnités qu'ils peuvent espérer. Inclusivement, à cause de leur effet pervers, elles pourraient rendre les licenciements beaucoup trop faciles pour les employeurs, étant donné que cela ne leur coûterait pratiquement rien.

Quelle application pour le barème Macron ?

Le barème d'indemnisation fait l'objet de nombreux débats aussi bien dans la doctrine que dans les prétoires.
Les positions varient d'un conseil de prud'hommes à l'autre. À travers un jugement, le conseil de prud'hommes du Mans a considéré que les dispositions de l'article L.1235-3 du Code du travail n’étaient pas contraires à l'article 10 de la convention de l'OIT. Il en a déduit que le barème Macron pouvait bien être appliqué. S'inscrivant dans la même optique que le conseil de prud'hommes du Mans, le conseil de prud'hommes de Paris, dans un jugement du 27 mars 2019, a appliqué le barème et a balayé du revers de la main son inconventionnalité. Le juge du conseil de prud'hommes de Caen en a fait de même.

Inversement, un jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Troyes a exclu le barème Macron et condamné le défendeur au paiement de dommages et intérêts sans aucun lien avec l'ancienneté du demandeur. Les dommages et intérêts ont été fixés à 9 mois, pour presque 3 ans d'ancienneté. Le conseil de prud'hommes de Lyon a fait pareil, pas en arguant l'inconventionnalité du barème Macron, mais parce que le contentieux en question datait de 2015 et était donc postérieur à l'avènement de l'ordonnance Macron.

L'aval du Conseil d'État et du Conseil constitutionnel

Le Conseil d'État a doublement validé le barème d'indemnisation Macron. Dans un premier temps, il a donné son approbation au moment d'examiner le projet d'ordonnance, en émettant un avis positif quant à la régularité de ce projet. Dans un second temps, la validation de l'ordonnance par le Conseil d'État a fait suite à une requête en référé de suspension initiée par la CGT. Le Conseil d'État a analysé la requête ici au titre de ses fonctions juridictionnelles.

Pour justifier sa requête, la CGT a brandi les mêmes moyens que ceux sur lesquels s'appesantissent les conseils de prud'hommes, c'est-à-dire l'article 10 de la convention n°158 de l'OIT et l'article 24 de la charte sociale européenne. Le Conseil d'État a de son côté rassuré quant à la conformité de cette ordonnance à l'égard de ces deux textes.

De son côté, le Conseil Constitutionnel a tablé sur des arguments différents. D'abord, il a décidé le 21 décembre 2018 que des restrictions pouvaient être apportées au droit à l'indemnisation d'un préjudice couvert par l'article 4 de la Déclaration des droits de l'Homme de 1789, du moment que le législateur prévoit pour des questions d'intérêt général des circonstances dans lesquelles la responsabilité peut être engagée. Sur cette base, il reconnaît que l'ordonnance Macron poursuit réellement un motif d'intérêt général.

Ensuite, le Conseil constitutionnel ira plus loin en stipulant que le barème d'indemnisation ne met aucunement en place des garde-fous insensés en comparaison à l'objectif poursuivi, étant donné que le barème est le résultat des moyennes observées des indemnisations recommandées par les conseils de prud'hommes. Il poursuit en faisant remarquer la non-applicabilité du barème en cas de nullité du licenciement, résultant de l'une des hypothèses de non-application évoquées plus haut.

Enfin, le Conseil d'État justifiera son aval au barème en arguant que le principe d'égalité ne fait en rien obstacle à la volonté du législateur de considérer l'ensemble des critères qui définissent le tort subi dans la fixation du barème.
Sur la base de ces trois arguments, il conclura en affirmant que le barème Macron ne viole pas les principes constitutionnels fondamentaux que sont la liberté, l'égalité et la garantie des droits.

Cette double validation du Conseil d'Etat et du Conseil constitutionnel, dans leur posture de hautes instances nationales, devrait rendre simple et fluide l'application du barème. Or il n'en est rien. De fait, les conseils de prud'hommes (pour la plupart d'entre eux) qui jusque-là se sont prononcés, se sont affranchis du barème, avançant les arguments soulevés à l'encontre du barème Macron, c'est-à-dire sa contrariété avec l'article 10 de la convention n°158 de l'OIT et l'article 24 de la charte sociale européenne.

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